Les vendanges à Rossignol (Dordogne). Sud Ouest du 30 septembre 2014.

Le vin de Rossignol

Publié le 30/09/2014 à 06h00 par

Jean-Louis Savignac

Dans la famille Vedovotto, tout le monde cueille le raisin, du plus petit au plus grand, sous l’œil de Corinne Ducoup, maire du village (à droite). © Photo

Photo Jean-Louis Savignac

C

ouché dans les rangs de vigne, le chien Mistral n'en a pas perdu une miette, ni un grain. Il était de la partie, dimanche, entre merlot, cabernet, baco et autres cépages aux noms moins poétiques… On vendangeait chez les Vedovotto, sur les 14 ares que Camille cultive avec acharnement et amour. Peu de traitements, à part le sulfate, mais beaucoup d'huile de coude et des journées à manipuler la tranche. « Le raisin est beau, mais il a quand même été abîmé par la grêle. La vigne, c'est du travail. Rien que pour tailler, il faut une semaine. Il faut y être souvent et ensuite préparer la cuve, les barriques, faire le foulage, le soutirage », explique Camille. Il devrait produire de trois à quatre barriques. De quoi satisfaire (avec modération) la consommation familiale.

Publicité

Le pari de replanter

Les Vedovotto ont toujours vendangé, depuis leur arrivée en 1937. Ils avaient quitté la région de Venise pour s'installer en tant que fermiers au château de Jaurias. Dans la commune, on a compté de 700 à 800 hectares de vigne. Mais ça, c'était avant. Et avant les ravages du phylloxera qui a réduit le vignoble à peau de chagrin. On a replanté et récolté le vin de Jaurias, autrement nommé de Rossignol. Un vin apprécié, se souvient Camille Vedovotto qui a décidé de planter 600 pieds à proximité de son domicile, il y a une quarantaine d'années. Aujourd'hui, la commune compte 4 hectares de vigne au total, pour une quinzaine de propriétaires. Un nombre qui diminue chaque année.

Goût de retrouvailles

Ciseaux en main, une vingtaine de vendangeurs, des personnes de la famille, des amis, des voisins, ont eu raison du raisin. Et à midi, sous la charmille, où la table était dressée, Camille n'était pas peu fier de faire déguster son pineau de 2013 et celui de derrière les fagots, qui a perdu son acte de naissance. « C'est un pineau d'il y a quelque temps », glisse-t-il, pour s'excuser.

En cuisine depuis la veille, Marie-France, son épouse, joueuse de vielle et membre de la troupe des Chanterelles, avait préparé un bœuf bourguignon. Le tout servi avec une tourte au tour de taille respectable, confectionnée par le nouveau boulanger du village, Gilles Defontaine.

Les convives ont reconstitué les tablées d'antan. Fanny Vedovotto, la reine de la félibrée de Verteillac, présidait. On a évoqué les « nouvelles du pays », entre la grappe et le fromage. Et les élections sénatoriales. À 8 h 20, Corinne Ducoup, née Vedovotto, maire du village était à Périgueux, pour voter, avant de rejoindre les vendangeurs. C'est dans la cuve installée dans sa maison toute proche que le vin de Rossignol est en gestation. Il sera soutiré dans une dizaine de jours. Un vin qui est une histoire de famille.

Jean-Louis Savignac